Lundi 22 septembre 1997
Reprise de travail difficile après un week-end un peu chargé et riche en émotion.
Je ne tiens pas en place.à 18h00 je vais voir François réveillé...
J'ai l'impression que ça fait une éternité qu'il est "absent" alors que ça ne fait "que" 9 jours.
Dans la matinée j'ai un appel du compagnon de François. Le médecin a préféré lui prescrire un arrêt de travail pour les 3 semaines qui arrivent, le temps que son organisme s'adapte au traitement et qu'il se retrouve un peu maintenant que François est sorti d'affaire.
Il a prévu que nous allions voir François tous les 2. On laissera 1 heure à ses parents et nous on prendra l'heure suivante.
Ça m'arrange, je commençais à avoir du mal à supporter la mère de François qui ne cessait de s'ériger à la fois en mère courage et en mater dolorosa et commençait à tenir des propos qui ne me plaisaient qu'à moitié. Je peux certes comprendre, mais je trouve qu'elle était souvent déplacée, notamment face aux familles d'autres malades du service qui étaient réellement entre la vie et la mort et pour qui il ne restait que l'attente en priant, croisant les doigts ou toute autre méthode aussi efficace.
17h00 enfin je saute dans ma voiture, direction l'hôpital, je retrouve tout le monde là-bas, pourvu qu'il n'y ait pas trop de bouchons...
17h45 je suis arrivée, je file à l'étage de la réanimation, me présente au service pour avoir le feu vert pour le vestiaire, et là on m'annonce que ça ne sera pas possible car son frère est venu voir François aussi et ça ferai trop de monde... Je l'ai très mauvaise, car le frère en question n'adresse plus la parole à François depuis 6 ans, l'évite autant que possible ; et par la même occasion François en fait autant. On ne connait pas la raison de cette situation mais ça ne doit pas être une broutille car François n'est pas rancunier en général et il a beaucoup le sens de la famille.
Mais qu'était-il venu faire ce satané frère ?
Devant ma mine déconfite (et les larmes aux yeux) l'infirmière, qui commence à me connaitre, va voir le chef de service pour savoir si je peux ne serait ce que passer 5 minutes. Celui ci va voir l'état de François avant, l'attente est longue mais la réponse est positive...
Je fait le nécessaire au vestiaire et enfin j'arrive dans le box. Il y a son compagnon, son frère et sa mère.
Je suis accueillie par un" Salut cocote " accompagné d'un grand sourire qui me fait monter les larmes aux yeux (oui encore) Il est en pleine forme, on ne dirait pas qu'il vient de manquer d'y rester et de passer 10 jours dans le coma.
Il se tourne vers sa mère et lui demande de bien vouloir partir avec le frère importun, la mère s'exécute même si elle a bien failli s'étouffer...
J'apprend par la suite, par les infirmières, qu'elle était auprès de son fils depuis 14h00 et qu'elle n'avait même pas eu la décence d'aller prendre un café quand le compagnon de son fils est arrivé pour lui laisser au moins 5 minutes de répit.
Les retrouvailles se font rapidement et sont très" é prmouvantes "
Les 5 minutes passent très vite. C'est si bon de le voir bouger, sourire, de l'entendre parler...Le chef de service passe pour me dire qu'il faut que quitte les lieux, je m'apprête à obtempérer quand il remarque que nous ne sommes plus que 2. Il se tourne vers François," Monsieur X vous avez envie que votre amie reste un peu plus longtemps ? Maintenant que votre mère est partie c'est OK si vous voulez.
Et hop j'ai gagné une demi heure de visite.
C'est impressionnant la vitesse à laquelle il a récupéré. Je m'attendais à le trouver moins vif, mais là il était même déjà caustique...
Je suis sur un petit nuage pour le retour. Ouf on a juste frôlé l'horreur, mais maintenant tout va aller, il va remonter au service" maladies tropicales" (ben oui c'est le service qui s'occupe des malades du Sida à l'époque)
Je suis tellement épuisée par toutes les tensions et émotions de ces derniers jours, qui enfin se libèrent, qu'à peine arrivée chez moi je m'effondre au lit. Je fais un tour de cadran et n'entendrai pas le téléphone sonner comme en atteste le message sur le répondeur trouvé le lendemain au réveil...